23.5.07


Toujours les cochons…

Hier, je suis descendu en ville pour défendre l'honneur et le métier de mon ami Yan Lindingre. J'habite à la lisière d'une forêt. La ville Metz où j'ai vécu vingt années, est en contrebas . Je déteste ça. Descendre et manifester. Je traîne peu en ville, je suis devenu sauvage et vaguement agoraphobe. Je l'ai fait parce que ce qui arrive à Yan est profondément injuste, bête et n'est pas sans rapport avec ce qui m'arrive. C'est loin d'être une affaire d'Etat. C'est juste un petit gars, prof aux Beaux Arts, que ses élèves aimaient bien, qui dessine des personnages avec des têtes de cochons. Son directeur (un noblion ayant eu son boulot on ne sait comment...) et une de ses collègues, ont cru se reconnaître dans une planche d'un album très fendard (Titine au bistrot, éd Fluide glacial). Lui, un petit gros, se goinfre à un cocktail. Elle, une grande sèche (je parle des personnages), jure et s'énerve en allemand. Au dessus de la tête de la fille, pour signifier son énervement, une croix gammée. Uderzo en dessinait au dessus des têtes de pirates dans Astérix. Hergé faisait pareil avec le capitaine Haddock. Pour qui s'intéresse un minimum à la bédé (qui est une forme d'art enseignée dans ces écoles), c'est d'une telle évidence. Or la fille est juive. Ce que Yan ignorait. Pour régler des comptes internes à l'école où des profs s'affrontent sur les méthodes d'enseignement, les deux têtes de cochon citées plus haut en ont alerté une troisième : le sénateur-maire de Metz, mon vieux copain, Jean Marie Rausch (pour ceux que ça intéresse, il est un des héros de mon film histoire clandestine qu'on trouve dans toutes les Fnac et Virgin du pays). Ils ont accusé Yan de révisionniste. Ce qui est énorme quand on connaît Yan. Le plus inquiétant est que la micropilule est passée et s'est transformée en ogive. Le maire l'a viré. Il sait aujourd'hui qu'il a fait une connerie, mais comme il est devenu très vieux et encore plus buté, il ne veut pas le reconnaître et comme dans cette ville - à part quelques exceptions- tout est mort ou à son service, tout passe. C'est donc pour cette raison que je suis allé me fondre dans une petite foule encerclée de dessinateurs, de militants de la CFDT, de trois conseillers municipaux et d'étudiants des Beaux Arts. Cette histoire, comme celle de Placid qui s'est fait condamner pour avoir dessiné un flic à nez de cochon, celle de ces bloggers poursuivis pour avoir publier des pv d'instruction, celle de ces journaux locaux et indépendants harcelés pour écrire des vérités (Tonic en Alsace, CQFD à Marseille, La Feuille à Villeneuve), celle d'Emmanuel Poncet et de Libé condamnés à 70 000 euros (dixit Joffrin) pour avoir fait un parallèle entre les juges disciplinés d'Outreau et Eichmann, participent de la même atteinte à la liberté d'écrire, d'informer. Et donc de penser.
Même sur des microévéments comme ceux de Metz et de Yan, il est devenu temps, je crois, de se bouger. La pente est devenue boueuse et je sais de quoi je parle.
Sur le font de mes affaires, mon avocat Michel Zaoui va mieux. Il est toujours convalescent mais a récupéré, après deux mois d'hôpital, cent pour cent de ses potentialités. On va donc bientôt à nouveau nous défendre devant les tribunaux français.
Au Luxembourg, la folie judiciaire continue. D'habitude, quand on fait appel d'une décision, le délai est d'un an. Me concernant, ils ont été super méga rapide. Nous avions fait appel de leur décision du 9 mai de nous faire passer en correctionnel suite à la vieille plainte de Fortis (voir plus bas sur ce blog où les juges luxembourgeois avaient décidé de transformer un délit de presse (prescrit) en un délit de droit commun (non prescrit). Pascal Lorent et moi sommes convoqués le 5 juin au tribunal de Luxembourg pour cet appel. Que dire ? Si seulement ces magistrats luxembourgeois mettaient le dixième de l'énergie qu'ils déploient à me coincer à combattre les criminels financiers qui rincent les banques du pays… Mais bon, je vais la fermer. Je risque une lourde condamnation…
Merci à tous les journalistes qui ont envoyé leurs cartes au blog de soutien. Du fond du cœur. N'oubliez pas qu'après moi, si vous cherchez à exercer votre métier, ce sera vous…

(http://jesoutiens.blogspot.com/)…

DR

16.5.07

L'acharnement

Plus je me défends, plus Clearstream se braque et ne montre pas le moindre soupçon d'autocritique ou d'humanité. Je viens de recevoir la notification d'un arrêt de la cour de cassation m'annonçant que le jugement déboutant la multinationale basée à Luxembourg suite à mon interview par Thierry Ardisson dans son émission "Tout le monde en parle" était cassé. Les deux instances m'avaient donné raison tant sur le fond que sur la forme quand je mettais en cause le fonctionnement de Clearstream en tant qu'outil de dissimulation de transactions financières internationales. C'était en 2002 suite à la sortie de "la boîte noire". Nous sommes en 2007. Et nous repartons pour un tour.

DR


14.5.07

Sortie cette semaine en poche du roman
La domination du monde...
de Denis Robert.





12.5.07

Extrait du Parisien (11 mai)

- "Un chef d'entreprise ne doit pas être suspect à priori, il crée de la richesse, des emplois."
- QU'EST-CE QUI PEUT GARANTIR CETTE ÉTHIQUE? demande le journaliste
- "La curiosité et l'esprit d'investigation des journalistes." répond Vincent Bolloré, ami de trente ans de notre nouveau pdt, dans une ITW au Parisien.

+ à noter : le blog spécial "journalistes", pour le soutien à Denis Robert > cliquez ici

10.5.07

DENIS EST MECHANT

La voyoucratie en col blanc du monde entier tient avant toute chose à son honneur. L’honneur est sacré, pas touche. Comme en Sicile. D’accord, j’ai tué ta famille, mais si tu embrasses ma sœur, t’es mort. L’honneur !

Justement, il se trouve que dans une des dernières lettres d’amour que reçue par Denis Robert, le procureur d’Etat du Luxembourg lui reproche ainsi qu’à Ernest Backes d’avoir méchamment imputé à une personne un fait précis qui est de nature à porter atteinte à l’honneur de cette personne ou à l’exposer au mépris public.

Pour preuve de la diffamation, le plaignant envoie les extraits de Révélation$ qui disent ceci :

Le 8 août 1991, alors même qu’Ernest Backes était en grande discussion avec le Premier Ministre Santer, une opération de retrait d’actifs a été liquidée sur un des comptes en CEDEL de la BCCI. Ce jour-là, sur le compte 13935 au nom de la Bank of Credit and Commerce International Luxembourg, ont été débités cent cinquante-sept postes de valeurs mobilières (en actions et obligations) totalisant quelque 100 millions de francs français (environ 15 millions de dollars). L’ensemble de ces valeurs a été transféré vers un compte non publié CEDEL : il s’agit du compte numéro 32506 BGLCLIEN, de la banque Générale du Luxembourg. La Banque Générale du Luxembourg et CEDEL, deux des plus importantes institutions financières de la place, pouvaient-elles ignorer la fermeture de la BCCI dans 83 pays dont le leur? Leurs responsables avaient-ils conscience du risque qu’ils couraient, en cas d’enquête d’être poursuivis en tant qu’auteurs et coauteurs de «détournements de fonds et de banqueroute frauduleuse» ?

D’autres extraits sont donnés, notamment des extraits de l’émission 90 minutes – les dissimulateurs.

La teneur des autres extraits de ce que le bon procureur d’état luxembourgeois veut présenter aux juges est la même.

Soit : des faits, des faits et des questions que se posent les enquêteurs, comme: La BGL et CEDEL ../.. pouvaient-elles ignorer la fermeture de la BCCI dans 83 pays dont le leur ?
Ce ne sont pas des questions difficiles : il suffit de cocher «oui» ou «non». Ou «ne sait pas». Ou «ne se prononce pas».

«Oui» veut dire: effectivement, monsieur Denis Robert, vous nous avez pris la main dans le sac. Là, c’est la case prison tout de suite.

«Non» veut dire: bon d’accord monsieur Robert, on le reconnaît on est des blaireaux incapables de savoir ce qui se passe dans notre boîte. Là c’est plutôt : au revoir messieurs, bien le bonjour aux assedic.

«Ne sait pas» veut dire: on est plus que des blaireaux. D’ailleurs, on ne savait même pas qu’on bossait pour une banque, nous on croyait qu’on était boucher chez Roger. Là, c’est cassez-vous, on veut plus vous voir !

Et puis il y a
«Ne se prononce pas». Avec un petit plus: ne se prononce pas, mais vous demande de vous excuser parce que vous dites du mal de nous.
Voilà toute la perversité de la justice aux mains des pitbulls procéduriers. Pas une seconde, ces gens-là reprennent les faits et gestes qui leur sont imputés pour démontrer qu’ils sont erronés ou légèrement différents. Pas une seconde.

Mieux : ils étalent à nouveaux les extraits d’enquête de Denis Robert dans le document à charge contre le journaliste. Et l’on y peut voir que l’essentiel du travail de Denis est un matériau brut d’enquête : tel fond était là, il est passé par ici et il est repassé par là. Avec les dates, les lieux, les numéros et les noms. Rien de bien difficile à réfuter. Lui du moins est parvenu à produire ce qu’il avance. Ces extraits produits par l’accusation sont édifiants. Et pourtant, ce sont les accusateurs eux-mêmes qui les brandissent fièrement.

On y perd son latin.

On imagine soudain le procès d’un homme qui se dirait accusé à tort par le livre de sa femme racontant qu’elle est battue, et qui produirait ce type de document :
Mardi matin, mon mari m’a réveillée en me donnant un coup de fer à repasser, puis, il m’a violée devant dix voisins et m’a enfermée dans la cave pendant une semaine…

On entendrait ensuite l’avocat invoquer le délit de diffamation : le pauvre homme est méchamment accusé de donner des coups de fer à sa femme, de la violer et de la séquestrer !
Que valent, en effet, un petit bleu sur le front, un petit mal au cul et une semaine de pain sec au frais (surtout avec les canicules qu’on a !) face à l’honneur de cet homme qui va maintenant devoir vivre toute sa vie en fumier révélé ?

Avec ce nouveau procès de Denis, on a l’impression de vivre la même histoire : les juges se préoccupent beaucoup de l’honneur des banques et de leurs responsables sans s’attarder une seconde sur les faits. Etre méchant avec un méchant, c’est plus grave que d’être méchant tout court ?

Je crains, une fois de plus, de ne pas avoir la même réponse que les juges.

Kafka (Francis Kuntz au Groland)

1.5.07

La contribution d'Erwin Act


La lettre de résiliation de ses avoirs chez Fortis. Lettre authentique.

"Dans le cadre d'une plainte diligentée contre le journaliste Denis Robert,
Fortis Banque attaque l'auteur d'une enquête sur Clearstream pour des faits
s'appuyant sur une imprécision de l'auteur concernant la légalité ou pas
d'une transaction de 15 millions d'euros, entre le compte non publié d'une
banque, la BCCI et le compte non publié de la banque plaignante. Jamais
l'authenticité des documents produits (liste de comptes, microfiches de
transaction...), n'a été remise en cause. Ces allégations étant d'une
barbarie extrême, je vous prie de publier un communiqué de presse afin de
rassurer les petits clients dont je fais partie.

J'attends de votre organisme qu'il attaque le journaliste en infirmant
l'authenticité des documents que l'auteur présente publiquement ou, à
défaut, une démarche logiquement inverse...

Que l'auteur ai, ou non, froissé la notoriété d'une personne est votre
souci. Que vous n'apportiez pas plus d'éléments rassurants concernant les
questions de fond soulevées par l'auteur est mon souci et celui de tous vos
clients.

Au risque de vous faire sourire, je m'engage à rester client de votre banque
si l'une des deux solutions est retenue. Ceci tant pour la gestion des
comptes bancaires que je vous ai confiés que dans les assurances que j'ai
contractées auprès de Fortis en toute confiance.

Vous noterez que les éléments dont fait état Denis Robert constituent pour
moi et ma famille des éléments dont je n'avais pas connaissance au moment
des accords contractuels par lesquels nous sommes mutuellement liés. En
l'absence de réponse de votre part, je me verrais dans l'obligation de
suspendre nos relations sans autres forme de préavis.

Je vous accorde donc, vous le comprendrez, ma confiance jusqu'au mois de
juin. À vous de rassurer vos clients.

Bien à vous,


yves lespagnard "